[L'Arche du Lion] Retrouvailles

Le cri d’une mouette extirpe la jeune femme de ses pensées. Les ailes de son nez se dilatent et frémissent, ses narines inhalent instinctivement, avec une sorte de délectation, les odeurs qui tourbillonnent et la taquinent tour à tour : l’iode piquant et salé de la mer, la fumée d’un feu de bivouac, des rires chaleureux échappés d’un navire à quai et au-dessus, à peine perceptible, un chant… poignant et mélancolique.

Calme est la mer… en ces prémices d'aurore. Et ses eaux mouchetées de timides reflets d'un soleil levant sont emmitouflées d’une brume pâle et mouvante, tel un rempart magique érigé afin de ravir aux yeux des étrangers l'insolite port de l'Arche.

La jeune femme s’étire et pousse un long soupir d’aise, ses yeux rivés sur les crêtes mousseuses des vagues discrètes, luisances d’émeraude et d’argent, qui viennent lécher les poutres du ponton, presque timidement, à ses pieds. Un sourire paisible éclaire de douces lueurs sa face sombre, dont les traits fins, racés, faussement froids, donnent l’impression d’avoir été taillés à même la roche. Une roche vivante, faite d’ombre et de lumière… Sa main s’élève pour s’égarer dans la masse souple de sa longue chevelure de miel, alors que ses prunelles bleues se perdent dans la contemplation rêveuse de ces navires dont les voiles claquent hardiment sous le vent des embruns. Et la brise salée lui souffle les rumeurs éparpillées du cri des marins, de leurs ritournelles joyeuses, égrillardes… et toujours, en fond sonore, ce chant, triste et lancinant…

L'aboiement d'un chien dont le son claque en cette aube pâle attire son attention, alors que ses pas l'entraînent vers les abords d'un autre navire. L'Indomptable. murmure-t-elle, un léger sourire en coin. Près de l'animal se tient un homme à la stature imposante dont elle ne voit pas le visage. Des cheveux d'un blond vénitien frémissent sur ses larges épaules en de suaves ondulations. Il porte une tenue de cuir ajustée, sans aucune ostentation. Un rapide coup d’œil à sa mise simple, et la jeune femme poursuit sa promenade, d'une démarche sereine. Elle ne cherche guère à attirer le regard sur elle.

"Du calme. Ce n'est qu'une mouette..."

Le lévridrake lâche un gémissement frustré avant de s'asseoir aux pieds de son compagnon. Le Capitaine de l'Indomptable observe son navire, un trois mâts dont il a appris à connaitre les forces et les faiblesses lors des nombreuses courses menées aux côtés des Loups Gris, puis au sein des Chasseurs de Jade.

Un sourire s'étire sur ses traits. La perspective de reprendre enfin la mer lui réchauffe le coeur. Ses obligations au sein la Compagnie l'ont poussé à gérer diverses affaires à terre, mais il est temps à présent de reprendre la mer. Il ne s'agit à priori que de transporter quelques marchandises de valeur jusqu'au port sis au sud est des collines de Kessex. De là, il reprendrait la route jusqu'au Promontoire Divin. D'autres affaires l'attendaient.

L'un des officiers à bord de la frégate lui fait un signe de la main, le sourire aux lèvres.

"Ahoy, Capitaine !
- Ahoy, Urtel !"

Plus bas, à l'attention de son compagnon canin.

"Allez viens..."

Raeniel soulève le sac de cuir à ses pieds et le passe sur l'épaule, s'apprêtant à poser le pied sur la passerelle de bois reliant le quai à l'Indomptable.

Un frémissement l'étreint alors que la voix de l'homme retentit, claire et chaleureuse... et toujours ce soupçon d'aplomb assuré ?! Asherah s'immobilise, les yeux écarquillés sur une vision lointaine, toujours présente à son esprit malgré les grains de sable qui, au fil du Temps, persistent à vouloir effacer la danse des souvenirs... même les plus vivaces. Elle pince les lèvres et déglutit sa salive, humectant ses lèvres soudain sèches. Dix années se sont écoulées... c'est impossible...

La jeune femme pivote alors sur ses talons et avise ledit Capitaine dont le pied se pose sur la passerelle reliant le quai à l'imposant navire qui jette son ombre mouvante alentour. Un bref toussotement pour éclaircir sa gorge enrouée avant qu'elle ne hèle l'homme.

- Raeniel... ? Elle marque une pause. Raeniel de Caledorn... ?

Asherah se tient droite, attendant une réaction, ses cheveux de miel s'émouvant sous la caresse de la brise iodée.

Raeniel s'arrête net, et tourne son regard mordoré vers l'origine de l'appel. Un bref coup d’œil lui suffit à détailler la silhouette de la belle jeune femme qui se dresse sur le quai. Sa peau hâlée, ses yeux azur et ses cheveux de miel : malgré la décennie passée, une telle combinaison reste inoubliable. La jeune fille est désormais une femme, dont les formes sont savamment mises en valeur par une chemise blanche à lacets et un pantalon serré de cuir sombre. Des dagues passées à sa ceinture évitent toutefois aux nombreux loups de mer arpentant le port de la prendre pour une innocente brebis. Jusqu'à ce qu'elle tombe sur une meute plus déterminée du moins.

« Inconsciente », marmonne le capitaine tout en caressant la fine barbe couleur flamme qui encadre ses traits fins.

Le chien s'avance vers la jeune femme, n'osant toutefois s'approcher trop près malgré son envie de sentir son odeur. La voix de son compagnon s'élève, plus assurée encore que par le passé, tandis qu'une petite flamme malicieuse éclaire l'or de ses yeux.

« La Dame des Illusions me poursuivrait-elle jusque dans ce port ?  Je dois l'admettre, une telle vision vaudra bien quelques prières en retour.»

La jeune femme esquisse un fin sourire. Un pouce crocheté à sa ceinture à laquelle oscillent ses précieuses dagues, elle demeure droite. Les années écoulées n'ont en rien entaché la fierté qui émane de tout son être... malgré les épreuves dont les sombres vestiges semblent parfois vouloir crever la surface limpide de ces deux prunelles bleues qui accrochent le regard de son interlocuteur et s'y emmêlent.

- Je ne te savais pas si pieux. Mais... si tu insistes, j'allumerai un cierge en ton nom. Asherah esquisse quelques pas, se rapprochant de l'homme.

Oui. C'est lui... ces cercles d'eau flamboyante entre leurs paupières frémissantes de malice à peine voilée. Cette carrure d'homme qu'une longue décennie d'errances et d'expériences n'a fait que renforcer. La vue de la barbe - qu'elle découvre ! - fait naître un sourire sur ses lèvres gourmandes.

Raeniel lâche un rire bref.

"Tout dépend à qui tu... l'empruntes ?"

Le lévridrake revient vers son compagnon et s'asseoit de nouveau, observant son interlocutrice, ses yeux sombres pétillant d'une étonnante intelligence. Immobile, le Capitaine de l'Indomptable darde ses prunelles or sur la jeune femme. A la malice s'entremêle toutefois autre chose. De la déception ?

"Tu as bien changé, Asherah. J'ai quitté une enfant prometteuse, une jeune fille à peine remise sur le droit chemin. Et je retrouve une femme, arpentant sans vergogne des lieux... peu fréquentables. Dois-je regretter ma décision passée ?"

Le rire d'Asherah se mêle à l'écho de celui de Raeniel. Tout aussi bref. Mais l'amusement demeure, enfermé entre ses paupières étrécies.

- Non. Elle croise les bras sous sa poitrine, le menton levé. Et quand bien même la regretterais-tu, que ferais-tu... ? Tu me sermonnerais, comme autrefois tu le fis... ou bien... Sa main s'élève et fouette l'espace entre eux. ... tu me filerais une bonne correction ? Un sourire en coin, taquin. Elle laisse s'égrener quelques secondes avant de poursuivre. Tu n'as rien à regretter, Raeniel.

Puis sa main brune tapote les flancs d'une escarcelle oscillant à sa ceinture.

- Quant à ton cierge, je le paierai ! Je peux même t'en offrir une dizaine. Elle dresse un index, théâtrale. De quoi expier tous tes péchés !

Et de se fendre d'un large sourire.

- Avec plaisir ! Je ne suis guère portée sur l'alcool... je me contente de le servir. Un petit clin d’œil avant de délaisser les prunelles mordorées de Raeniel pour porter son attention sur les lignes du navire qui leur fait front de toute son imposante masse. Hm... l'Indomptable. Il t'appartient ? Il m'a semblé entendre l'un de ces hommes, là-haut, t'appeler Capitaine... ?

Et de marcher vers lui sans attendre de réponse pour crocheter son coude à son bras libre.

- Tu me fais visiter, Capitaine ? Et ce sourire en sus. Entre effronterie et malice.

Raeniel pousse un soupir mi-las, mi-amusé, tandis que la jeune femme s'accroche à son bras. Un léger sourire, un haussement d'épaules, et le voilà qui la guide le long de la passerelle jusqu'à ce qu'ils soient tous deux à bord. Poussant un jappement, son compagnon leur emboîta le pas avant de filer saluer certains des marins qu'il connaît bien. Ce qui se traduit bien souvent par des hommes d'équipage assis ou peinant à tenir debout, deux immenses pattes posées sur leurs épaules. Des rires fusent de ci, de là. Après tout, la mascotte du navire est de retour à bord...

"Bienvenue à bord de l'Indomptable, jeune fille. Et oui, j'en suis bien le Capitaine. Mais c'est une longue histoire, et je suis curieux d'entendre la tienne plutôt."

Avec autorité, il l'emmène jusqu'au château arrière où se trouve ses quartiers, non sans saluer au passage les hommes et les femmes qu'ils croisent, avec un étonnant mélange de franche camaraderie et de respect. Tous arborent sur leur tenue la même broche : une tortue de jade à la carapace d'or stylisée évoquant un écu. Ils se retrouvent rapidement dans la cabine du Capitaine, où il dépose sa besace de cuir, bientôt rejointe par l'épée longue qui quitte rarement son flanc. Décorée avec goût, la pièce est meublée d'antiquités. Ici et là, diverses reliques évoquent la profession de leur propriétaire. Sans parler des cartes...

D'un geste, Raeniel désigne une table en bois exotique, autour de laquelle se trouvent quatre sièges.

Assis toi donc...

Ses lippes ne se désarmant pas de ce sourire amusé, la jeune femme se laisse entraîner par le Capitaine de l'Indomptable. Alors qu'ils évoluent vers le château arrière, ses prunelles se prêtent à une toute autre errance, glissant sur les physionomies de l'équipage, sautillant de visage en visage, avisant la présence de cette broche de jade en forme de tortue qui émiette des reflets d'or sous les rayons du soleil levant. La brise de mer fait frémir les immenses voiles et le chant d'une mouette solitaire vibre au-dessus de leur front. Elle se contente de hocher la tête en guise de salut, aucun son ne s'échappant de ses lèvres jusqu'à ce que Raeniel et elle atteignent la cabine et s'y engouffrent.

Demeurant immobile au seuil de la pièce tandis que le Capitaine se soulage de son sac de cuir et de son épée, Asherah découvre les lieux.

Raeniel a écrit:

"Assis toi donc..."

La jeune femme acquiesce mais n'obtempère pas tout de suite, marchant d'un pas lent, toujours serein, autour de la cabine, ses bottes de cuir faisant soupirer les lattes du sol. Ses doigts bruns, légers, effleurent les lignes de ces antiques objets - sans doute légués par une noble conquête ou acquis au terme d'incroyables et dangereux périples ? Cette pensée lui arrache un rictus espiègle. Puis elle reprend un masque de feinte gravité, poursuivant son exploration visuelle. Ses yeux semblent soupeser la valeur de ces 'vieilleries'.

Un soupir d'aise. Elle se détourne et, humectant ses lèvres, finit par prendre place sur l'un des sièges désigné par son ancien 'bienfaiteur'.

- Le temps où tu portais fièrement l'uniforme des Séraphins semble être révolu. Je me souviens encore de l'effet que me fit cette armure blanche, brodée d'or, sur mon pauvre petit cœur fragile d'être sans défense... Un rire. Elle se laisse aller contre le dossier, tout en croisant ses jambes. D'un geste vague de la main, elle désigne les lieux. Tu t'es reconverti, donc ?

L'homme observe le manège de la jeune femme, un sourire amusé aux lèvres. Son regard mordoré se détourne et Raeniel s'approche d'un large bar en tek, dont il retire une bouteille au contenu pourpre et deux verres très anciens en argent. Tous deux frappés du sceau de la Tortue. Il dépose le tout sur la table, avant d'aller récupérer une autre bouteille, un ovale au contenu ambré. Sans se départir de son sourire, il verse chaque breuvage dans un verre différent avant de s'asseoir, face à Asherah. Loin de la rigueur du Séraphin qu'elle avait connu, sa pose est on ne peut plus décontractée.

"J'ai abandonné le prestige d'un uniforme pour un autre", lâche-t-il, des étincelles de malice parsemant l'or de son regard. "Je suis désormais un libre négociant, mais surtout un explorateur... et un chasseur de trésors. Et toi ? Si tu me disais plutôt quels chemins tu as parcouru pour échouer ainsi à l'Arche du Lion ?"

Asherah suit l'homme d'un regard attentif. Elle semble s'amuser à détailler ses gestes, épiant le mouvement fluide de ses mains ou notant les différentes postures de ce corps athlétique engoncé dans sa tenue de cuir. Un battement de cils. Alors qu'il évoque ses nouvelles activités, elle le dévisage longuement avant d'émettre un discret sifflement d'admiration.

- Négociant, toi !? Elle frappe dans ses mains. Explorateur !? Et chasseur de trésors !? Je suis... impressionnée ! Et je comprends d'autant mieux la présence de cette... Sa main caresse ses joues au hâle velouté. ... barbe !

Un rire léger. S'extirpant du siège d'un bond léger, elle s'approche de la table et s'empare du verre en argent. Un instant le fait-elle tourner entre ses doigts, se perdant dans l'étude du sceau dont il est gravé, avant de reporter l'attention de ses vives prunelles bleues sur Raeniel. Pressant sa cuisse contre le rebord de la table, elle élève le verre devant elle, sa tête auréolée de sa couronne de miel se penchant légèrement sur le côté.

- Et si nous trinquions à ces retrouvailles ? Ses doigts pianotent lentement sur le bois exotique.

L'intéressé caresse presque machinalement ladite barbe à son évocation, avant de s'emparer de son verre. Il hume un instant le parfum du vieux breuvage à la couleur ambrée. Ses yeux dérivent quelque peu, se perdent brièvement dans la contemplation des falaises surplombant le port, parfaitement visibles à travers les fenêtres du château arrière. Son attention se reporte sur Ashera. Un franc sourire éclaire ses traits et il lève son verre dans sa direction.

Soit. Aux retrouvailles...

Son verre tinte doucement contre celui de Raeniel.

- Quant aux chemins que j'ai empruntés...

Asherah s'interrompt, inhalant à son tour les effluves qui s'évaporent du breuvage pourpre. Elle humecte ses lèvres puis se redresse, esquissant quelques pas autour de la table. Son regard scrutateur s'attarde sur le mobilier antique, sur la riche collection de reliques, sur les cartes empilées dans un coin. Sa promenade silencieuse l'entraîne alors derrière le Capitaine de l'Indomptable. Là s'immobilise-t-elle, s'octroyant une gorgée de ce liquide fruité avant de prendre la parole d'une voix aux douces fêlures.

- Tu te doutes bien qu'après avoir dénoncé le Chef de ma bande, il aurait été inconscient de ma part de rester au Promontoire... l'appel de la vengeance suivait chacun de mes pas et l'obscurité des venelles était devenue inhospitalière, même pour une fille telle que moi. Alors... Une gorgée. ... j'ai cherché à me rendre utile ailleurs. Je ne te cache pas que... lorsque mes poches étaient trouées, je ne rechignais pas à voler pour calmer la faim qui me brûlait les entrailles.

Sa main libre se pose sur l'épaule de Raeniel, s'y presse.

- Puis une troupe de saltimbanques m'a prise sous son aile. Une autre gorgée. Une poignée d'adresse, une pincée d'illusion... et le tour était joué ! Un léger haussement d'épaules. J'ai suivi ces artistes nomades dans leurs pérégrinations à travers la Tyrie. Ce fut... une période riche en expériences.

Asherah se penche par-dessus le siège, son visage se rapprochant de celui de son 'bienfaiteur'. Sa main libre coule vers la broche qu'elle titille du bout des doigts, ses ongles courts en grattant la surface ciselée.

- Raconte-moi l'histoire de cette tortue... Un murmure parfumé contre l'oreille, escorté de la caresse d'une boucle de miel.

Asherah derrière lui, Raeniel reprend sa contemplation du paysage qui se dessine à travers les fenêtres du château arrière. Il ne semble pas s'émouvoir plus que cela du rapprochement subtil opéré par la belle jeune femme. Écoutant avec attention, il porte le verre à ses lèvres et boit une gorgée du vieux breuvage ambré. Une douce chaleur le parcourt, tandis qu'il écoute avec attention les propos de son ancienne protégée.

Il retire ses gants qu'il jette négligemment sur la table, près du verre qu'il vient de reposer. A ses pieds, son compagnon s'étire avant de se recoucher, la tête penchée, le regard posé sur cette inconnue. Douce, la voix de Raeniel sélève de nouveau.

"Une période riche en expériences ? Je vois que tu manies l'art de l’euphémisme avec autant de talent que lorsque je t'ai connu."

Sa main se porte sur la broche qu'il arbore, accrochée à son baudrier d'épaule. Leurs doigts se touchent, geste innocent de la part du capitaine.

"Quant à cette tortue, elle représente qui je suis aujourd'hui. Mon héritage, et mon avenir..."

Asherah délaisse la broche, retirant ses doigts de la main innocente de son 'bienfaiteur'. Elle s'écarte et, tout en remuant le liquide aux luisances sanguines, reprend sa place sur le siège. Une gorgée, son regard céruléen se plantant dans celui, lamellé d'or, de Raeniel par-dessus le bord du verre argenté.

- Et tout comme cette tortue, tu portes une carapace. Car si, pour toi, je manie l'art de l'euphémisme... tu es resté maître dans l'art du mystère et des métaphores indéchiffrables.

Un soupir amusé. La jeune femme se penche en avant et abandonne le verre désormais vide sur la table. Elle s'enfonce dans le siège, ses coudes posés sur les accotoirs, ses longues jambes croisées, étendues devant elle.

- Délicieux...

Elle lève sa frimousse sombre vers son interlocuteur, lui offrant un simple sourire.

- Tu es sur le départ... ?

Le lévridrake lève la tête au son de la corne de brume. Il jette un œil à son compagnon, dont les sourcils se sont froncés. Il se dirige vers la porte, annonçant l'arrivée d'un nouveau venu avant même que le bruit des pas ne se fasse entendre, suivi des deux coups secs.

"Entrez", lâcha Raeniel d'une voix forte et impérieuse.

Alors que le chant d'une corne de brume retentit, interrompant le cours de leur conversation, Asherah hausse un sourcil. La curiosité anime son regard alors qu'elle tourne sa face sombre vers la porte de la cabine. Gardant une posture décontractée, elle patiente, Raeniel ayant invité la personne à entrer.

Raeniel se lève et incline la tête en direction d'Aeryn. Ses traits ne trahissent guère ses sentiments, malgré la vague inquiétude qui le gagne.

"Merci, Lieutenant. Je monte immédiatement sur le pont."

D'un geste rapide, il s'empare du fourreau contenant sa lame, qu'il accroche à son baudrier. Le pas vif, il quitte la cabine, baissant légèrement la tête pour passer la porte tandis que son fidèle compagnon le devance, s'élançant dans les coursives.

La jeune femme au profil oriental a écouté le rapide échange entre le Capitaine et le Lieutenant. Un navire - peut-être appartenant à la flotte marchande de Raeniel ? - était de retour au port et semblait présenter quelques avaries. Lorsque ce dernier s'équipe et quitte la cabine avec un certain empressement, elle se lève d'un bond preste et lui emboîte le pas, l'une de ses mains brunes emprisonnant la garde d'une de ses dagues jumelles.

- Ah ! un peu d'animation ! lance-t-elle en passant devant la femme aux cheveux noirs à qui elle adresse un clin d’œil espiègle. J'ai bien crû que ton Capitaine s'était empâté avec les années... Un dernier sourire effronté et elle disparait dans le sillage de son ancien 'bienfaiteur'.

Debout sur le pont, Raeniel observe les manœuvres d'approche du Brick. Au-delà des dommages matériels, il s'inquiète du nombre d'hommes perdus. Il laisse échapper un léger soupir, avant de se tourner vers Aeryn :

"Lieutenant, faites surseoir au départ. Nous lèverons l'ancre plus tard que prévu. Que les hommes restent à bord jusqu'à nouvel ordre.
- Bien, Capitaine."

Aussitôt, son second transmet ses ordres, rapidement relayés par le Premier Maître Urtel à tout l'équipage.